Les Hommes de Main : Mafia Blues Brothers
Au tournant des années 2000, on vit surgir une flopée de
films directement inspirés des Soprano ;
comme cette incroyable série, tous cherchaient à coupler des intrigues de films
mafieux (la violence, l’argent sale) à des thématiques « psychologisantes »,
portés sur les personnages – sans jamais retrouver la grâce de l’œuvre de David
Chase. C’est de ce bois-là qu’est fait Les
Hommes de Main. Voyons plutôt : Matty est le fils d’un gros bonnet du
crime de Brooklyn, mais on ne peut pas vraiment dire qu’il lui soit semblable :
révulsé par le milieu, incapable de commettre le moindre acte de violence, il
cherche depuis des années à percer en tant qu’agent sportif, en vain. Un jour,
il parvient enfin à convaincre son père de lui confier une mission : le
transfert d’un sac de gros billets. Évidemment, comme la loi du genre semble l’exiger,
rien ne se passera comme prévu…
Les Hommes de Main
est le premier film en tant que réalisateurs d’un duo de scénaristes, Brian
Koppelman et David Levien, plutôt bons auteurs, spécialisés dans les films
sur le poker (le très bon Les Joueurs,
Ocean’s 13 ou plus récemment Players), mais pas cinéastes pour un
sou. En effet, une fois les bases de l’intrigue, classique mais pas
désagréable, posées, tout part à vau-l’eau. L’histoire piétine et les acteurs s’ennuient
– ce qui arrive fréquemment quand chacun joue ni plus ni moins exactement ce
que l’on attend de lui : ainsi retrouve-t-on Barry Pepper (Il faut sauver le soldat Ryan, La Ligne Verte) dans le rôle du mec
sympa-à-qui-il-faut-quand-même-pas-la-faire, Seth Green (Buffy contre les vampires, Austin Powers) dans le rôle du geek largué et, last but not least, Vin Diesel qui endosse son inusable blouson de gros
dur. Tout juste aura-t-on de quoi se consoler avec les apparitions rigolotes de
ces vieux cabotins de Dennis Hopper et John Malkovich, qui jouent toujours les
psychopathes comme personne, et de Tom Noonan, hier mythique bad guy de Last Action Hero, malheureusement ici réduit à jouer les
utilités.
Bien sûr, un argument de poids consisterait à dire que rien
n’est plus médiocre dans ces Hommes de
main que dans 90 % des films du même genre. C’est vrai, et si l’on poussait
un peu plus loin le raisonnement, l’on pourrait même concéder que, dans ses effets de
manches visuels et ses artifices narratifs, le film n’en est pas moins putassier
que le cinéma, disons, d’un Guy Ritchie. Il ne s’agit là que du pompage en
règle d’un cinéma un temps très en vogue et qui a aujourd’hui déjà beaucoup
vieilli – celui de Quentin Tarantino et ses dizaines d’imitateurs. Mais,
malheureusement peut-être, là n’est pas la question : on a beau avoir vu
cela déjà cent fois, la cent-unième est toujours de trop.
Comme on l’a dit plus haut donc, le film se veut porté sur la
« psychologie » de ses personnages. Ainsi, selon des ficelles assez
grossières, c’est ici de tuer le père (tout du moins le père spirituel) qu’il s’agit,
histoire de s’affirmer en tant qu’homme et de prendre ses responsabilités. C’est
tout ? Oui, à peu près, et c’est bien peu.
Les Hommes de Main (Knockaround Guys), Brian Koppelman & David Levien, 2002. Avec : Barry Pepper, Vin Diesel, Seth Green, Andrew Davoli, John Malkovich.