Independence Day - Resurgence : Soupe à l'alien (et croûtons)

 
C’était en 1996 : Will Smith ne jouait pas encore les mercenaires tireurs d’élite, Jeff Goldblum n’en aurait plus pour long à chasser les dinos mais Roland Emmerich s’amusait déjà à faire péter la Maison-Blanche. Depuis, l’ami allemand a fait péter New York (Godzilla), le monde entier (Le Jour d’après), des mammouths (10 000), le monde entier, mais différemment (2012), la légende shakespearienne (Anonymous) et la Maison-Blanche, une fois encore (White House Down). La boucle est bouclée ? Possible, c’est en tout cas une explication possible à l’existence d’Independence Day : Resurgence, sérieux candidat au titre de suite la plus incongrue qui soit.
 
Autant être clair : celui qui cherche finesse et volupté devant le cinéma d’Emmerich a passé la mauvaise porte. Dire cela n’a rien de nouveau, puisque ce bon Roland sert, au même titre que quelques-uns de ses collègues – Tony Scott hier, Zack Snyder aujourd'hui et Michael Bay pour toujours – de punching-ball un peu facile d’une critique qui n’aime rien tant que faire dans le marronnier intellectuel et joyeusement taper sur ce cinéma à l’idéologie « nauséabonde » prétendument destiné à rien d’autre que la corruption de nos chers âmes innocentes – ainsi que d’un public largement complaisant. Mais la vérité est ailleurs : chez Emmerich, toujours l’humanité se voit détruite de la pire des façons, mais est finalement largement responsable de son propre malheur. Insouciance énergétique, course à la technologie, politiques dévoyés : l’Homme n’a que ce qu’il mérite. Sans évidemment pouvoir se comparer aux grands maîtres du cinéma de studio subversif (Verhoeven, McTiernan), Emmerich, sous ses airs de ne pas y toucher, n’en fait qu’à sa tête – ce qui n’est déjà pas si mal pour des films aussi calibrés.
 
Ici, et comme toujours chez le réalisateur, l’Humanité est d’ailleurs représentée dans ce qu’elle a de plus variée. La question de l’appartenance ou de la « race » est bien présente mais, finalement, n’en subsiste qu’une seule, la seule qui ait toujours été : la race humaine, forcée de s’unir face à un ennemi aussi mastodonte que des aliens hostiles. Si l’équilibre entre les différents personnages n’est pas toujours bien dosé, tous (scientifiques, soldats, politiques, simples quidams ainsi qu’un bureaucrate qui ressemble étrangement au satiriste anglais John Oliver) sont logés à la même enseigne et se voient réservées le même traitement.
 
Un traitement trop paresseux – et c’est là depuis toujours le gros défaut du cinéma d’Emmerich. Doué quand on lui donne des gros joujoux à casser, le cinéaste se révèle vite coincé lorsqu’il s’agit de raconter quelque chose. Cela nous donne donc des dialogues souvent risibles, des romances au mieux improbables (Jeff Goldblum et Charlotte Gainsbourg, vraiment ?) au pire insupportables (la belle chinoise et le geek ricain). Même quand il a l’occasion de faire quelque chose de nouveau (une relation ouvertement homosexuelle entre deux personnages, soit une première dans le genre, au moins à notre connaissance), le réalisateur n’en fait rien, préférant embrayer sur une énième attaque spatiale.
 
On pourrait encore palabrer des vices et des vertus de ce type de cinéma pendant des heures mais ce ne serait pas nécessaire : Emmerich reste Emmerich. Ses farouches opposants continueront de brûler des poupées à son effigie et ses aficionados seront conquis dès les premières minutes  – et tant pis si les deux heures de métrage se font bigrement sentir. Quoiqu’il en soit, on n’a pas fini d’en parler puisque tout ça s’achève sur (spoiler) deux mots qui nous laissent clairement comprendre que tout n’est pas terminé : « voyage interstellaire » - merci Cricri Nolan. Ou comme le dit encore le film, mais de façon plus crue : « on va bouffer de l’alien ». Gare à l’indigestion.
 
Independence Day: Resurgence, Roland Emmerich, 2016. Avec : Jeff Goldblum, Liam Hemsworth, Jessie Usher, Maika Monroe, Sela Ward.

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