Lorenzo : L'élixir de la vie
Lorenzo est réalisé par George
Miller, réalisateur australien renommé pour ses contributions à la
science-fiction (la cultissime trilogie Mad Max) et à
l'animation (Babe – Un cochon dans la ville, Happy Feet). Avec ce drame très humain, il réalisa
pourtant ce qui peut sans doute être considéré comme son film à
la fois le plus intime et le plus universel. Intime parce que Miller
lui-même a étudié la médecine à l'université, et que sa
connaissance du sujet transparaît très clairement dans Lorenzo,
récit du combat des parents d'un jeune garçon atteint d'une maladie
orpheline pour découvrir un traitement adéquat. Et universel parce
qu'il est difficile de ne pas être happé par cette histoire, à la
fois ordinaire et hors du commun, et très émouvante. Une émotion
rendue possible par le traitement précis, complexe, qu'offre le film
à son sujet, et également par deux acteurs formidables que l'on a
rarement vu aussi bons. Augusto et Michaela Odone, les parents du
garçon malade justement nommé Lorenzo ne sont ni des médecins, ni
des chercheurs, simplement des gens terriblement ordinaires armés
d'un immense courage, bien que celui-ci ne résiste parfois pas aux
épreuves auxquelles ils doivent faire face. Ils sont idéalement
interprétés par Susan Sarandon et Nick Nolte.
C'est précisément cette harmonie
entre Miller et ses acteurs, entre les personnages et le traitement
que l'on donne comme cadre à leur histoire qui fait la force du
film. Jamais Lorenzo et ses parents ne sont filmés et racontés «
de haut ». Tous les individus aspirés par cette histoire, tous ceux
qui y sont mêlés (les médecins, les associations de parents
d'enfants atteints de la maladie), n'existent que par leurs relations
à travers les deux parents qui restent frontalement au cœur du
film. À l'échelle de ce genre ou sous-genre de films (les films
traitant du cancer et de la maladie), c'est un véritable tour de
force. La plupart de ces films éludent souvent d'une façon ou d'une
autre le sujet-même, soit en y mettant fin par la guérison (Funny
People, dont le dernier tiers n'est n'y plus ni moins qu'une
comédie romantique somme toute classique) ou en se cachant derrière
des artifices à la mode (50/50 et ses grosses ficelles, celle de la très fourre-tout dramédie). Un manque de courage avéré,
sans aucun doute. Ce n'est pas le cas de Lorenzo, qui
constitue avec Tendres passions l'un
des sommets du genre. Et le rapprochement entre les deux n'est pas
tout à fait fortuit ; dans les deux cas, se battre contre la maladie
passe avant tout par se battre pour la cellule familiale, la
conservation de ses liens affectifs et d'une certaine unité. Et la
métaphore ne s'arrête pas là : à la fin de Lorenzo, un
traitement a été trouvé, mais l'enfant n'en reste pas moins malade
– il le sera d'ailleurs à vie, en dépit de tout. De même, la
cellule familiale est toujours debout, vaillante, mais néanmoins
chancelante, fragilisée. Dans tous les cas, le combat continue. La
guerre est déclarée, comme dirait l'autre.
Lorenzo (Lorenzo's Oil), George Miller, 1992. Avec : Nick Nolte, Susan Sarandon, Peter Ustinov, James Rebhorn.