Comedian : Le feu sur les planches

Après l’arrêt de
sa sitcom Seinfeld (et son succès
historique), Jerry Seinfeld avait promis – juré, craché – qu’il n’emploierait
plus jamais les blagues qui constitué son matériel comique, souvent basé sur
des observations de la vie quotidienne et des remarques triviales – un baroud d’honneur
qui s’était terminée sur un dernier spectacle de stand-up diffusé à la
télévision américaine, opportunément intitulé I’m Telling You For The Last Time.
C’est sur cette table rase, de
redémarrage de zéro que se focalise Comedian :
obligé de rôder son matos dans d’obscurs clubs aux quatre
coins des Etats-Unis, Seinfeld est mis face au public et à son jugement
comme n’importe quel comique. Car comme le disent Seinfeld et Colin Quinn (un autre
comédien, ancien résident du Saturday
Night Live), il n’y qu’un seul mot d’ordre
en matière de représentation comique sur scène : être drôle. Peu importe
que vous soyez l’une des plus grandes (et plus riches) stars de l’histoire de
la télévision américaine, si vous n’êtes pas poilant, il faut quitter les
planches…
En parallèle de ce retour aux sources, le documentaire revient
également sur le parcours d’Orny Adams, comédien poissard ayant du mal à percer
et dont les névroses envahissantes l’empêchent sans doute d’accéder
à une forme plus épurée de son art. Il y
a beaucoup de bonnes choses dans Comedian :
une acuité, une réalité, fort inspirantes – jamais avant, peut-être, le pain
quotidien de ce qui fait la vie d’un comique, ses hauts et ses bas, n’avaient
été représenté aussi fidèlement et sans fard. Ce qui empêche le film de cesser
d’être un bon reportage et de devenir un grand documentaire, c’est peut-être
sa forme : jamais il ne dépasse le cadre appliqué, façon « Un jour avec… », format dont la télévision (et pas la
meilleure) est très friande.
Un métrage sans doute un peu trop scolaire et
appliqué, donc. Dommage, car les maniérismes de Jerry Seinfeld et
son énergie comique auraient été un bel écrin à un documentaire un poil
plus facétieux. Et on ne peut de toute façon être que
bienveillant à l’égard d’un film qui se
clôt sur le sublime Deacon Blues de
Steely Dan.
Comedian, Christian Charles, 2002.