Lui c'est Hercule, s'il t'attrape...
Il y a cette scène dans Bienvenue
dans la Jungle, comédie d’aventures neuneu dans laquelle Dwayne « The
Rock » Johnson, alors ex-catcheur et acteur encore un peu
approximatif, croise Arnold Schwarzenegger dans une boîte de nuit.
« Have fun » lui assure le Chêne autrichien.
L’échange est court, à peine audible et fut improvisé en direct
sur le tournage, mais qu’importe : le passage de témoin,
l’adoubement du last action hero sur la star d’action en
devenir, a lieu ici.
De fait, la carrière de Johnson suivra un
chemin largement pavé par l’ex-mister Univers : en gros, une
alternance de films d’action bourrins et premier degré (Commando
pour l’un, G.I. Joe : Conspiration pour l’autre) et
de comédies familiales tirant vers l’auto-parodie (Un flic à
la maternelle, Fée malgré lui). De péplums aussi : Arnie
avait eu son mythique Conan le Cimmérien (une suite aux deux films
80’s est d’ailleurs dans les tuyaux à l’heure où l’on
écrit ces lignes), The Rock aura Hercule. On est chez Brett Ratner
(le réalisateur pas manchot mais terriblement transparent déjà
derrière Family Man et Le Casse de Central Park), pas
chez John Milius – la comparaison s’arrêtera donc là.
Pourtant,
l’intérêt du film de Ratner, puisqu’il y en a bel et bien un,
est de réinterpréter de façon relativement neuve la légende
herculéenne : ici, l’homme n’est plus un demi-dieu et le
fils de Zeus, mais seulement un athlète va-t-en-guerre dont les
exploits ont largement été exagérés. Pour faire court : un
catcheur des temps antiques. Vu comme ça, Johnson assure plus que le
minimum dans le rôle, son personnage ayant pour occupation
principale de faire des blagues avec ses potes et de siffler des
cervoises à la taverne du coin. Il est aidé dans sa tâche par un
casting plutôt bien senti : John Hurt, Ian McShane, Rufus
Sewell, Joseph Fiennes – tous des Britanniques, car on le sait depuis
les séries Moi, Claude Empereur et Rome, les tirades
antiques paraissent tous de suite beaucoup plus classes avec l’accent
de Shakespeare.
De fait, c’est fun, débile juste à point,
correctement construit (une scène de baston grosso modo toutes les
vingt minutes – que demander de plus ?) et largement
inconséquent. On conseillera tout de même soigneusement aux
aficionados de péplums dits « classiques », c’est-à-dire
épiques et lyriques (comme Ben-Hur ou Gladiator) de
passer leur chemin, ou tout du moins de savoir à quoi s’attendre.
Car les enjeux sont clairement différents ici. « Have
fun », comme qui dirait.
Hercule (Hercules), Brett Ratner, 2014. Avec : Dwayne Johnson, John Hurt, Rebecca Ferguson, Rufus Sewell, Joseph Fiennes.