Pacte avec un tueur : Le livre délit
Décédé en 2007, John Flynn a connu le même destin que plusieurs de ses confrères réalisateurs avant lui : d’abord conspué pour ses films « d’exploitation » à la violence semble-t-il primaire, il fait depuis quelques temps l’objet d’une réévaluation critique, académique même, au point d’être récemment au cœur d’une rétrospective à la Cinémathèque française, le site de laquelle réhabilite carrément Flynn en tant qu’ «auteur d'une poignée de thrillers et films noirs qui, pour leur rythme particulier, sont parmi les meilleurs de leur époque » - rien que ça. Un récent hors-série de Première le qualifiait quant à lui d’ « artisan modeste », ce qui n’est déjà pas si mal.
De fait, on trouve de tout dans la filmographie de Flynn, du culte (Rolling Thunder, l’un des films préférés de Quentin Tarantino, ce qui n’est pas toujours un gage de qualité) au nanardesque (Justice sauvage – tout est dans le titre – énième prétexte aux gesticulations martiales de Steven Seagal), en passant par d’obscurs téléfilms et… des réussites, mineures mais bien réelles. Pacte avec un tueur est de celles-ci. A priori, tout y est : un bon flic, un assassin méthodique et froid, un braquage, des trahisons tous azimuts. Mais là où le film marque des points, c’est lorsqu’il s’amuse à pervertir, gentiment mais sûrement, les codes du genre : ici, c’est le bandit, ex-tueur à la solde du crime organisé et désormais fâché avec son employeur, qui traque sans relâche le flic (devenu auteur à succès, d’où le titre original) pour que ce dernier écrive son histoire.
Le savoir-faire artisanal, à l’ancienne de Flynn et son filmage solide transparaissent à chaque plan, tout comme l’ironie retorse et les dialogues aux petits oignons du scénariste Larry Cohen (connu en tant que scénariste de Phone Game, mais également réalisateur de pépites méconnues comme L’Ambulance ou Meurtres sous contrôle). Le film peut également se targuer d’être mené par deux acteurs en grande forme : l’incontournable James Woods (Il était une fois en Amérique, Casino) et l’excellent Brian Dennehy (surtout connu pour son rôle de shérif cruel dans Rambo, mais pas moins bon un peu partout ailleurs). Un morceau de bravoure : le personnage de Woods qui répond aux attaques verbales d’un cowboy local dont il regardait la copine d’un peu trop près, avant de botter le cul dudit cowboy et de lui piquer sa nana – laquelle réapparaîtra un peu plus tard en toute petite tenue. On notera par ailleurs que le film se distingue un poil du tout-venant des pellicules du même genre, puisque lorsque le « gentil » arrête le « méchant » à la fin, il ne le dessoude pas, et préfère le remettre aux autorités – et fait donc prévaloir la justice sur la vengeance. C’est peu ? Peut-être, mais le film ne vise pas plus beaucoup plus haut, et réussit dans à peu près tout ce qu’il entreprend. En bref : voilà le genre de fumet fort appétissant que l’on achète au poids et qui se déguste volontiers avec les doigts. Allez, hop : emballez, c’est pesé !
Pacte avec un tueur (Best Seller), John Flynn, 1987. Avec : James Woods, Brian Dennehy, Victoria Tennant, Allison Balson, Paul Shenar.