Mémoires de guerre : La bataille duraille

 
C’est dans un registre doublement chargé que s’inscrivent ces Mémoires de jeunesse. D’abord, il s’agit de l’histoire d’une « personne ordinaire [ici, une femme] plongée dans des circonstances extraordinaires », un cinéma dont l’un des fers de lance pourrait être, par exemple, Erin Brockovich. Ensuite, il s’agit d’un récit de guerre situé non pas dans les tranchées, mais dans l’arrière-pays, sur le « homefront », à l’instar d’une salve de films récents (Suite française, Queen and Country), qui témoignent de la popularité encore importante du genre.
 
Ici, c’est donc le destin de l’exemplaire Vera Brittain qui nous est relaté. Un destin qui fit l’objet d’un livre (cf. le titre) avant d’être logiquement adapté au cinéma, comme ce fut le cas pour d’autres récits de guerre ; celui de Martin Gray dans Au nom de tous les miens, par exemple. Comme dans le cas de l’histoire de Gray, hélas, l’objectif premier ici revendiqué est moins la véracité historique que l’idée de faire pleurer dans les chaumières. Rien n’est épargné à la pauvre Vera (et à nous non plus, du coup) : l’homme de son cœur tombe au front le jour de leurs noces, son meilleur ami perd la vue avant de mourir dans d’atroces souffrances, puis c’est au tour de son frère de périr, etc. Mais comme Vera est pleine de compassion et souhaite aider son prochain, toutes ces pertes ne feront que la renforcer dans sa volonté de prendre part au conflit en tant qu’aide de camp.
 
Le message du film est de fait assez simple, voire simpliste : la guerre, c’est mal, mais l’humanité et la bonté l’emporteront toujours sur l’horreur et la cruauté. Au moins, comme ça, c’est bien : même les quelques distraits du fond qui roupillaient jusqu’ici le sauront. Il y a quand même Alicia Vikander (l’interprète de Vera Brittain), décidée à porter à bout de bras un film qui n’en méritait pas tant – tant mieux pour nous. La caméra l’a compris, heureusement, et la suit à chaque instant, la filmant presque au plus près des sentiments. Son interprétation sèche et juste apporte ses quelques rayons de soleil à un film par ailleurs assez terne.

Mémoires de jeunesse (Testament of Youth), James Kent, 2015. Avec : Alicia Vikander, Kit Harington, Taron Egerton, Dominic West, Emily Watson.

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