(Happy) Days of Future Past : passé et avenir de l'univers ciné Marvel (Partie 2)
Captain America – Le Soldat d’Hiver : La symphonie des héros
Les Gardiens de la Galaxie : Les horizons lointains
Encore une fois, on zappe une
bonne parie des films sortis par la suite, pas fondamentalement mauvais mais
vraiment pas indispensables à la culture de l’honnête homme. Iron Man 3
d’abord, qui fait un peu mieux que le second film en éloignant l’Homme de Fer de ses
préoccupations habituelles et en proposant un twist assez roublard (et assez
débile), en tout cas à l’échelle du film de super-héros : le super-vilain est
en fait… un mauvais théâtreux chargé de faire diversion ! Ensuite et
surtout Thor : Le Monde des Ténèbres, qui échoue lui aussi à honorer la
mythologie convoquée. Plus que tout autre chose, ces deux films révèlent deux
des gros défauts de la stratégie à long terme de Marvel. D’abord, la preuve que
le studio propose dans la plupart des cas un spectacle qui n’est qu’un
intermédiaire, une liaison avant la prochaine grand-messe, les films Avengers. Des
films comme Iron Man 2 ou Le Monde des Ténèbres ont de fait une durée de conservation dangereusement limité, et leur intérêt lorsqu’on les considère hors du canon et
de la chronologie des films frôle le néant. Ensuite, et ce défaut-là découle
directement du précédent, que l’on n’est jamais totalement loin du cynisme
éhonté, voire du foutage de gueule. Si on lit entre les lignes, la stratégie du
studio sur certains films pourrait être, dans les grandes lignes : « oui,
on sait que ce n’est pas terrible, mais avouez-le, vous irez le voir quand même
juste pour ne pas être largué ensuite ». Pendant ce temps-là, les vendeurs
de lunettes 3D affichent un grand sourire. Le spectateur lambda, lui, finit par
se dire que c’est un peu fort de café – même s’il a bien conscience qu’on est
avant tout là pour lui vendre du pop corn.
Mais les décideurs de Marvel ont
au moins une qualité : ils sont malins. Et si le moindre énergumène sans
génie derrière son clavier peut montrer du doigt leurs défauts, évidemment sont-ils
capables de le faire eux-mêmes. Après les errements cyniques, on en revient
donc à un peu plus de premier degré – bien que le fun soit encore et toujours
le mantra affiché – avec l’excellent
Captain America – Le Soldat de l’Hiver, tout simplement l’un des meilleurs
films du MCU à ce jour et pour l’instant l’un des meilleurs films de la
décennie 10 (avec X-Men : Days of Future Past). Ce n’était donc pas
sorcier : tout ce qu’il fallait, c’était une intrigue solide, des seconds
rôles de choix et des bonnes références. Car en invitant Robert Redford à jouer
les méchants, c’est toute la mythologie du cinéma parano des années 70 que le
film convoque ; on pense par moments aux Trois Jours du Condor ou aux
Hommes du Président, c’est dire. Encore une fois, on dénote la capacité de la
licence Captain America à aborder avec acuité des sujets presque politiques,
ici la surveillance globalisée. Alors que toutes les trilogies du canon Marvel
(Iron Man/Thor/Captain America) sont terminées ou en voie de l’être, celle qui
met en scène le Cap apparaît clairement supérieure, et ce n’est sans doute pas
un hasard, au vu de la haute symbolique d’un personnage qui est le
porte-drapeau de son pays jusque dans ses contradictions.
Les Gardiens de la Galaxie : Les horizons lointains
Ça y est, ils l’ont fait :
le succès sans précédent des films sortis jusqu’ici, qu’ils soient exclusivement
centrés sur les justiciers ou mettant en scène le groupe entier, a installé les
héros comme des marques à part entière. Mais un problème subsiste, et il est de
taille : les Vengeurs étaient, au pire peu connus, au mieux des noms déjà
solidement ancrés dans la mémoire du grand public. Mais comment lancer une
franchise basée sur un comic book méconnu, qui met en scène une sorte de
version alternative, crasseuse et spatiale des Vengeurs ? Pas de
problème, que des solutions : ce sera Les Gardiens de la Galaxie,
remake autoproclamé d’Un Nouvel Espoir made in Marvel, supervisée par un sale
gosse, James Gunn, jusqu’ici plus connu pour faire dans le gore qui tache. Dès
l’annonce du film, Gunn avait annoncé la couleur : « Les Vengeurs
sont les Beatles, les Gardiens de la Galaxie sont les Rolling Stones ». Pour le reste, on est encore
sidéré par le sens du casting, assez génial, de Marvel (faire du héros de
sitcom grassouillet Chris Pratt le nouveau Han Solo, il fallait quand même y
penser), tandis que la bande-son et l'esthétique évoquent le meilleur du Spielberg
des 80s, celui d’E.T. et Les Aventuriers de l’Arche Perdue. Ne luttez pas,
l’enfant de 12 ans qui est en vous en redemande.
Le MCU en est alors à son 10è
film, et l’on ne peut là que saluer le tour de force que constitue déjà
ce projet pharaonique qui fonctionne comme sur des roulettes, en tout cas
commercialement – pour le reste, les coups et les douleurs… Plus encore, le
choix d’inscrire son dernier film en date dans la Voie Lactée toute entière est
révélateur : désormais, la Terre ne suffit plus à Marvel, ils ne cessent
de voir plus grand et veulent régner sans partage sur le royaume enchanté du divertissement.
Comme on dit d’ailleurs à la maison-mère (Disney) ou en tout cas chez l’une
de ses filiales, Pixar : vers l’infini, et au-delà.