La Maleta, de malle en pis


Votre conspiration criminelle, vous la préférez taille soute ou taille cabine ? Mario, opiniâtre employé du bureau madrilène des objets trouvés, ne se doutait pas, en trouvant une mallette carmin, qu’il venait de mettre un pied dans le monde merveilleux des odieux parrains, des hommes de main taciturnes et de l’atroce trafic d’êtres humains…

Depuis une décennie environ, une bonne partie des thrillers espagnols distribués sous nos latitudes sont de petits bijoux : La Isla Minima, La colère d’un homme patient, El Reino… Fort de cet « avantage du terrain », comme on dit à Suzanne Lenglen, Jorge Dorado (qui signe son troisième film) livre un polar classique et bien troussé. Sans pouvoir s’enorgueillir de la maestria de ses confrères Raúl Arévalo et surtout Rodrigo Sorogoyen, il filme la Madrid interlope et les plaines désertiques d’Argentine avec le même allant.

Le périple est d’autant plus appréciable que le réalisateur n’oublie pas la psychologie de ses personnages en cours de route. La grande idée est d’avoir doté le (anti-)héros de ce penchant tout à fait chrétien qu’est le syndrome du sauveur, et qui lui ferait faire absolument tout. Rien de tel, pour s’absoudre de ses péchés d’hier, d’aller à la rescousse des autres… C’est bien simple : Mario ne peut pas s’en empêcher. Pas bien loin non plus, cette idée du fatum, de l’inévitabilité du destin, que Jorge Dorado emprunte au théâtre antique et qui est présente dans le film noir depuis ses origines.

L’acteur Álvaro Morte, mis sur orbite par le carton de La casa de papel, porte sur ses solides épaules et sa barbe drue le récit. On peut parfois s’agacer de son incarnation mono-expressive d’un homme au passé trouble, mais celle-ci est – comme d’autres tics de La Maleta – finalement raccord avec la loi du genre dans ces films. Une trop grande obédience aux codes qui empêche sans doute cet habile polar de se muer en vraie tragédie.

La Maleta (Objetos), Jorge Dorado, 2022. Avec : Álvaro Morte, Veronica Echegui, Maria Eugenia Suarez.

Et pour poucer, commenter, réagir à un chouette blog : Sitcom à la Maison !

Posts les plus consultés de ce blog

Sylvain Lefort, critique : "Marcello Mastroianni a construit toute sa carrière pour casser son image de latin lover"

Mission: Impossible - The Final Reckoning, entre le ciel et l'enfer

Reporters, conflit de canards