Bumblebee : Robots après tout


 
Plus de 10 ans après ses débuts, et alors que Michael Bay (par ailleurs excellent cinéaste quand il veut) a contribué à en faire le parangon d’un divertissement hollywoodien jusqu’au-boutiste à l’absurde, la saga Transformers bouge-t-elle encore ? Le postulat reste d’une inanité redoutable : à ma gauche, les gentils Autobots, à ma droite, les vils Dece-p’tits cons, qui se battent pour la destinée de leur planète mécanique.
 
Comme beaucoup d’autres congénères exsangues, la série revient à ses origines – en 1987, plus précisément – avec un storytelling rompu mais balisé ; difficile de ne pas penser au (supérieur) Géant de Fer – qui devait lui-même beaucoup à E.T. Peut-être est-ce parce que Travis Knight (Kubo et l’Armure Magique) vient, comme du génial Brad Bird, du cinéma animé et parvient mieux que d’autres à concilier acteurs de chair et fonds verts omniprésents, dichotomie qui est désormais le lot commun du moindre blockbuster. Certaines scènes font mouche, comme celle qui voit le mutique Bumblebee jouer une relecture sidérurgique de l’éléphant dans un magasin de porcelaine. Un hommage amusant au burlesque muet. Aux antipodes, les scènes d’action et d’affrontement s’avèrent toujours aussi envahissantes et illisibles. Rien de plus qu'un récital de métal hurlant qui casse les oreilles.
 
Ce qui obsède le récit au point, peut-être, de le phagocyter, c’est les années 80. Une unité de temps inévitable pour un retour aux sources mais, plus encore, l’horizon révolu et fantasmé qui fut l’« âge d’or » du cinéma de masse. Hollywood, on l’a dit et répété, n’aura jamais autant regardé dans le rétro, jusqu’à revenir parfois à son point de départ. En 2018, déjà, Ready Player One, mash-up movie ultime orchestré par l'un des pères du genre, théorisait la pop culture 80's comme seule échappatoire d'un futur déjà nécrosé. La technologie dans son ensemble posait elle-même moins problème à l’époque : dans les premiers films, les puissances, publiques et privées (Stanley Tucci en sosie officieux de Steve Jobs), cherchent à tout prix à mettre la main sur la technologie alien, course à l’échalote qui ne fera que mettre de l’huile sur le feu des affrontements robotisés. Ici, le rapport aux machines semble bien plus serein, naïf – en tout cas jusqu’à l’inéluctable trahison finale. Parbleu, ces braves Decepticons aident même à développer un proto-Internet ! De façon similaire, la Chevrolet Camaro des précédents volets, voiture de séduction de la femme en tant qu’objet sexuel ultime (Megan Fox), n’est encore qu’une Coccinelle, véhicule bon enfant et émancipateur. Être un Transformer, c’était mieux avant ? En tout cas, chaque époque a les grosses machines (robots et blockbusters) qu’elle mérite.

Bumblebee, Travis Knight, 2018. Avec : Hailee Steinfeld, Jorge Lenderborg, Jr., John Cena, Pamela Adlon, Peter Cullen.

Et pour liker, commenter, s'insurger, l'aventure se poursuit par ici : Sitcom à la Maison !

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